4) L'improvisation

1 - Revenir à la définition.

" L'improvisation " est l'action d'improviser, et le résultat de cette action.

" Improviser " (du latin improvisus, imprévu), c'est créer et exécuter sur le champ, sans préparation une œuvre, accomplir une action. L'improvisateur doit être capable de réaliser instantanément son projet, grâce à une parfaite maîtrise de toutes les ressources qu'il peut mobiliser. E.Souriau Vocabulaire d'esthétique.

L'œuvre n'est donc réalisée et exécutée qu'une seule fois. C'est un moment unique.

En danse : celle-ci se nourrit de l'instant, de son environnement (humain, matériel, sonore…).

Le danseur s'appuie sur " l'intuition de l'instant " (G.Bachelard).

 

Le cœur de l'improvisation se situe au moment du choix, de la décision de s'engager dans une voie que l'on va explorer et qui en même temps ferme provisoirement d'autres possibilités.

L'improvisation, à l'exception des cas où elle se déroule pour le simple plaisir de celui qui l'exécute, nécessite un cadre organisateur permettant au spectateur d'apprécier le travail présenté. La difficulté réside dans la nécessité de révéler la structure et l'unité du parti pris dans l'immédiateté de la réalisation.

 

2 - Ce qui unit l'artiste et l'élève.

L'improvisation en danse artistique est ici offerte au regard des autres. La conscience de cette offre est contradictoire avec le naturel, la spontanéité du mouvement dansé et l'abandon dans l'imprévu, l'urgence. La situation de représentation contredit l'improvisation, la déstabilise parfois. Ce problème est au cœur de la situation d'improvisation et en constitue une spécificité. Sa gestion devient un élément d'apprentissage important.

Enfin, choisir dans l'urgence, se donner des contraintes ou des libertés sans hésitation, détermine également l'originalité de cette pratique.

 

3 - L'improvisation dans l'enseignement de danse en série L

Avant de danser sans chercher, il faut avoir beaucoup cherché en dansant. Les ressources mobilisées spontanément chez le professionnel sont nombreuses, complexes et surtout maîtrisées.

Cette forme de pratique n'est pas accessible directement aux élèves. L'école installe plus volontiers le sens de sa pratique dans celui d'une composition en temps contraint. Ce temps même bref permet d'installer les cadres dans lesquels l'improvisation du mouvement dansé sera réalisée. Il s'agit d'inscrire l'élève dans une situation de désadaptation acceptable où l'engagement sera encore possible mais avec une prise de risque. La mémorisation même courte de séquences de mouvements dansés dans le temps de préparation n'entrave en rien la prise de risque dans l'interprétation, le jeu avec l'environnement, l'émergence de procédés (récurrence, amplification, suspension…) dont la séquence sera l'objet.

 

4 - Thème ou sujet d'improvisation ?

Ce temps de préparation nécessite donc de délaisser la notion de "thème", plus appropriée à l'improvisation véritable, pour celle de "sujet", notion plus scolaire.

Le sujet sera conçu pour contenir une question implicite, une notion à re-questionner.

L'évaluation portera sur la pertinence du re-questionnement. Exemple : " faites entrer la rue dans la danse ". La gestualité en danse est questionnée dans sa potentialité esthétique, poétique, expressive. Le geste, les postures, les attitudes du quotidien peuvent-ils être dansés - sont-ils dansants - ne sont-ils pas déjà de la danse ?

 

5 &endash; L'improvisation dans le temps d'enseignement

Il ne s'agit pas de s'entraîner à l'épreuve d'improvisation, qui n'est pas une situation d'apprentissage. Les propositions seront graduées en fonction des compétences des élèves, notamment à mobiliser les ressources dont ils disposent, de leur aptitude à se donner une contrainte ou à faire un choix qui devra être annoncé a posteriori par exemple. Les interventions de l'enseignant s'écarteront de la recherche d'une norme préexistante pour aller vers un accompagnement guidé dans l'improvisation. Il s'agit de susciter a posteriori la réflexion sur le ressenti, le vécu et la pertinence des propositions au regard du sujet posé. Croiser les regards.